LA MER SAUVAGE
À Jean-Guy Pilon.
J’ai pris la foëne et le harpon
au-delà des forêts, des lacs sans nom,
des mille rivières,
dans une mince pirogue de tremble
qui me berçait.
Je me suis reveille sur la plage
immense et vide de la Mer sauvage,
où dans les sables bat encore
le cœur rebelle
de mon requin,
sous le soleil furieux
qui sonnait à grands coups
dans ma tête,
tandis que je tirais sur le filin,
et mon fer plongeait avec le fauve
dans l’eau verte bouillonnant
comme des entrailles.
En ce jour couleur d’apotheose
je titubais sur le gaillard d’avant
dans les giclees d’ecume et les semonces
de la Bête innommable
herissee d’anciennes ferrailles,
de grappins, de crocs inimaginables
et de trente harpons rouilles
que je ne cesse en rêve de lancer
sur le squale de mon enfance dans une rage
inguerissable.
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