Українська та зарубіжна поезія

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LAS ABALOCHAS BAILAN PARA DHAMBALA

(À partir d’un tableau de Wifredo Lam portant ce titre,
tableau où l’on voit les Abalochas, disciples et grandes prê-
tresses reunies, tenter de porter remède au dieu vaudou Dham-
bala, qui se meurt. Tuyaux-sondes et danse sacree, verbe de
qui s’en va.)

Je n’ai ni feu ni loi ni dogme
Je suis seulement cette vieille douleur qui hurle par les
yeux
L’espace
Sombre à l’horizontale de votre sacree danse d’angles
et de becs
C’est la douleur seule qui danse – pas vous, Abalo-
chas
Ni vous ni ce que vous appelez
Moi
Douleur brute
Douleur pure
Engoulevents et carapaces
Elle danse de tous ses masques
De tous ses rythmes immobiles
Et vous croyez danser
Et vous croyez
Et vous projetez
Je meurs en chaque foudre et chaque orange
– Dansez, Abalochas
Allumez tuez les grands trous noirs
Le vent se tait il emporte la jungle
Pourquoi ecoutez-vous ce qui jamais ne s’ecoute?
Pourquoi n’ecoutez-vous pas?
Etes-vous sans pourquoi?
Y eut-il jamais de l’ecouteur dans l’ecoute?
Douleur d’Abalocha
Entendre
A la fin est-il son?
Vous savez vous y prendre, vous savez vous y perdre
Dansez, Abalochas
En me soignant à la torture
En m’humanisant à moelle
Me crucifiant sans le moindre hasard
Me bouddhifiant dans le sourire à main de cheval
Me shivaïsant, m’etiquetant, me dhambalaïsant
Vous pliez ma jambe et ne me voyez pas –
Vous ne tenez rien en me voyant
Douleur, douleur
Je ne suis pas l’ombrelle du funambule sur chute noire
Je suis seulement ce que ta danse allume, Abalocha
Je suis la chance la seule : blessee à mort
La perfusion universelle vous vacille les jambes
Mais ce que vous cherchez, hommes des tuyauteries
fourchues
N’est pas une statue à recoudre
Ni la silhouette blanche des galaxies en fuite
Ni la Très-Vieille la Tenace – la douleur
– Nie la douleur, Abalocha
Et vous, Abalochas des Abalochas, niez-la
Niez la mort avec
Si vous pouvez
Moi, Dhambala, même
Moi, votre danse même votre illusion
Je meurs
Je meurs à tout instant je meurs
Et vous priez exorcisez pensez et inventez
Vous fusez et infusez, Abalochas
De conjuradons en placebos
Et je meurs
Et vous pouvez danser jusqu’à la fin des gouffres
Et sur tous les sommets je meurs
Vous pouvez accomplir les rites
Explorer les mondes
Les impostes les impasses les impossibles
Les passages d’inaccès
Les metaphores d’entre vos vies vos ombres
Je meurs
Seul debout
De ne jamais l’être
Je meurs pour ne pas renaître où vous m’attendez
Je meurs je n’accède pas je ne suis pas la naissance
Autre que sonde dans la poitrine
Qu’eblouissement au centre vide
Sans mot ni geste en toutes mains et langues
Je souffre vos dix mille morts vos divines sciences et
phenix
Je souffre de toutes vos cendres
Vos images vos tabous vos totems
Et l’aberrant pietinement natal des astres
Je meurs et vous dansez
Comme si je n’avais jamais cesse de mourir
Pour que vous dansiez
Dansez Abalochas la Chose est immobile


Vous me perdez en m’invoquant
Vous vous perdez en m’inventant
Vous et moi sommes
D’avant le feu
C’est la douleur seulement
La douleur qui nous le danse
Échos brises dans le secret des avalanches
Vous les initiees les arcanes
Vous, Abalochas venues à l’aube reptilienne
En couperets de lianes en mythes en catachrèses
Vous n’existez pas ni Dhambala ni les îles ni les hommes
Mais votre danse nous lie
A la beaute de ce que nul œil ne voit
Nous sommes au monde : nous n’en sommes pas
Un cri sans cri traverse
Ce goût de terre et d’herbe que prend parfois l’amour
Ce goût de vent d’embruns que prend parfois la mort
Abalochas Abalochas c’est cette douleur
Et nous l’aimons

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LAS ABALOCHAS BAILAN PARA DHAMBALA - SERGE SAUTREAU