L’AIR DANS NOS TRACES
Lumière qui nous imprègne par les lèvres.
Le seuil, lorsque tu ignores si c’est l’air qui tremble, si
c’est toi.
On ne traverse pas la montagne, on se traverse.
Au vent des crêtes erodant le corps, l’affûtant comme
les pierres.
Ce que la vie n’a pas ouvert, la mort nous le refuse.
Tu te preserves ou tu prevois : la buee sur les vitres ne
parle pas d’elle.
Tempête assourdissante où s’obstine à tinter une cla-
rine.
De quel soleil, comme l’aubier, sommes-nous la
memoire?
L’attention nous allège, nous enracine.
Oiseaux migrateurs, eclat des galets, nous faisons plus
que voir.
Oreille sur la roche comme à l’orifice des conques.
Ah, si nos yeux un madn de brume attiraient la grive…
On nous jugera comme on juge les murs aux parie-
taires.
Tu as manque d’amour, tu ne desirais que l’autre ver-
sant.
Qui accompagnons-nous dès que nous quittons les
routes?
De pierre en pierre une eau consciente, de mot en mot
un souffle.
Tu n’es plus seul, tu te sais vulnerable.
Pour viatique une poignee de neige.
La main qui tâtonne, la main qui deploie.
Avec la nuque, avec les tempes, nous n’ajouterons que
des dieux allègres.
La duree juste, le bruissement des feuilles.
Vague plus forte, plus presente, qui annonce une vague
nouvelle.
Ne dis pas que la plaine est vide, decouvre-toi.
Regard comme une fleur de mars, pour toutes les sai-
sons.
Envier l’eclair, envier la graine.
Pour ne pas oublier l’amont, suivre le cours du fleuve.
Aimer aussi la flamme pour son ombre.
Maisons, chemins, une concentration prodigue.
L’inconnu n’a pas un autre visage, celui de nos enfants.
Un silence fidèle, partout, à la vision des chardons
bleus.
Nous cacherons le plus possible la honte, l’essouffle-
ment.
Bon signe : les obstacles n’ont pas disparu, ce ne sont
plus des ennemis.
Qui croyait la paume si profonde, bienveillante?
Ne pas laisser un souvenir, mais une source.