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LE REPAS DES OISEAUX

… pour manger des chairs de rois, des chairs de forts,
des chairs de chevaux et de cavaliers, des chairs de tous
hommes libres ou esclaves, petits ou grands^.
A l’aube, sur les eaux, ce premier appel
qui frissonne d’avoir d’un coup debonde l’etendue.
Et toi tu radotes en radoubant ta barque,
tu marmonnes des choses que ne peut comprendre
la Huppe Yafoûr du roi Salomon,
sur la solitude des eaux et l’inconstance des hommes,
sur la peur quand soudain s’obscurcissent les portes,
tu remâches encore ces plantes amères du cœur,
comme si tu ne savais pas que la faute, la seule
est de n’avoir pas su aimer assez, que cette douleur…
Ici finissent les œuvres de la mer, les œuvres de l’amour2.
Ordre nourri d’une gorgee de braise
devore par la soufflerie des ailes.
1. Apocalypse de Jean, XIX, 18.
2. Georges Seferis, Mythohgie, XXTv”.
Puissance et rigueur du fin balancier
qui commande aux angles du ciel.
Arcs graciles des côtes, scelles de nacre,
voûtes jumelles posees sur l’axe du vol,
ici s’amarrent les muscles de la forge
ces fibres et filins qui tendent les vents.
Une boule de choses qui tremblent dans la main,
deux ou trois couleurs, une idee folle
qui passe par la tête, une heureuse
nouvelle traverse en courant les murs,
retrousse un instant les dessous de lumière
et nous laisse à nos miroirs de nostalgie –
mais telle est l’imprudence qui nous irrigue.
Plume eclose d’un bourgeon d’epiderme, duveteuse
et tendre, puis rigide, etançonnee, la siccite minerale
greffee aux sèves par le calame, le rachis porteur de la
double rangee de barbes divisees comme l’eclair, bar-
bules lisses et d’autres pourvues de crochets solidement
imbriques, etançonnant la voilure quand ils s’unissent
aux plumes voisines, tectrices de couverture, à barbes
duveteuses, plumules floconneuses, isolantes, remiges
de couvertures alaires, plumes fermes du vol, rectrices,
pennes de la queue servant de gouvernail, plumes d’ap-
parat, oublieuses d’espace et de vents, bigarrees, iri-
sees, faisant la roue.
Matin dans le duvet de mer : ferments gris de couleurs.
Tes yeux fouillent et se perdent dans les creux.
Amont prodigieux, cataracte immobile de rumeurs –
buee d’encres et d’ardoises sur la vitre de Dieu.
Écailles et poudres sur la terre.
Montagnes gris-bleu d’attendre
que se declarent les quatre horizons –
l’humble idee de l’eau sur les tables absolues.
Glissement de lignes et de muqueuses,
puis la grande voix de l’Ange debout dans le soleil
qui convie les oiseaux à se repaître.
Prends ton sac d’indigence
de chimie chuchotante, fouineuse,
va dans le pur sifflement de lumière,
bègue boiteux, paquet de venin,
tes os remplis de craquements de fauvette.
Le soleil est dejà haut et tu ecoutes les cailloux.
La lumière est un vivier de bulles et de bonds legers,
tu flottes au plafond de grandes salles liquides
et tes mouvements nagent decousus dans le tain –
il y a ce bruit de degel que rendent à midi les fonds
des boues qui ont tant englouti de clameurs –
la note pure de l’eau tient ferme l’agonie
d’un rayon pose hors d’haleine sur les pierres –
les filets sont jetes comme d’habitude
et tu regardes incredule le ciel sans nuage –
et qui sait le lieu et qui sait le temps?
Rappelle-toi les fonds sous la voûte glauque
la lueur dans la faille, le tressaillement des cœurs,
le fer rapide et la lutte obscure
pour remonter la mort dans la lumière.
Immobile à la barre, ses yeux d’ombre et de malice
perdus dans la brume legère des vagues, il murmure :
Mais que cherchent-elles nos âmes à voyager1 ?
Plus loin, plus loin que memoire
la bête rousse du soir sur la croupe des eaux
tant d’effervescence dans l’ineclaire
dans les vases glaiseuses de la chair,
qui sait, qui sait jusqu’où l’on peut brûler
jusqu’où te suivrai-je ineffable fraîcheur?
Rides et ravins dans la peau sèche de l’ete
(tu ne voyais pas de halte à ces fièvres)
pâleur sans fond, odeur de paille effritee
clarte au soir à rien redevable
ruine de l’œil où la presence des choses
ramasse ses pepites musiciennes –
Marins derisoires, ronges de sel et d’injures
la gorgone du naufrage tatouee sur nos bras,
qui nous conduira vers le port?
Tu es seul en cette nuit à lever l’ancre
de tant de regards que l’horreur t’a confies –
Nuit sur mer plus noire que mer.
Il faut ramer longtemps, je sais.
La barque est noire et blanche
la peau humide et frileuse
(ton corps sentait la resine vers l’aube et la sauge)
1. Georges Seferis, Mythologie, VIII.
je rame
une jubilation se tend sur les eaux couleur de ramier,
tu casses le pain cuit dans l’ecorce d’orange, –
la mer change rapidement d’armure
(je ne te reconnaissais plus le madn dans les draps du
regard)
la mer plie de grandes barres de miel roux,
la fraîcheur surprise dans les menthes, l’origan
et le nerprun epineux –
il y a des îles encore très accroupies
la chapelle blanche sur le dos et des femmes
qui viennent, greees de noir
comme si tout etait dejà tard et couvert de cendre.
une barque de pêcheur, là-bas, immobile, dur noyau de
lumière
sediment calme de celerite
sa chimie erode
le corps debout
ininterrompu de mer

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LE REPAS DES OISEAUX - LORAND GASPAR